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Darracq bicylindre |
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L'industriel et financier français Pierre Alexandre Darracq (1855-1931) avait d'abord fabriqué des bicyclettes sous la marque Gladiator, ainsi que des tricycles. Il fonda ensuite, en 1897, en association avec Raoul Perpère (1864-1950), une entreprise de construction d'automobiles, marque Darracq (ou Perpère-Darracq). En 1901, était présenté le premier véhicule (Darracq 6,5 HP), entièrement conçu et construit par la société, voiture qui grâce à l'emploi de tôles d'acier embouti pouvait être vendue à un prix compétitif. En 1903, fut acquise une licence de fabrication d'un moteur Léon Bollée 5 ch, avec changement de vitesse à colonne, équipement qui fut généralisé par la suite sur tous les modèles de la marque. En 1910, date de la fin de la production de voitures en France, le constructeur se plaçait dans ce pays, en troisième position derrière Renault et Peugeot, avec un volume de production atteignant 10% de la fabrication totale française. En outre, Alexandre Darracq fut le premier constructeur à concevoir un système de fabrication de pièces de rechange pour cycles et motocycles, vendues à des prix très bas.
Si le nom de Darracq s'estompa en France, il perdura un peu en Europe. L'industriel avait fondé en 1906, en Italie, la société Società Italiana Automobili Darracq, dont le siège était à Naples. L'objectif était d'assembler localement des modèles existants, afin de contourner les droits de douane. Le sud de l'Italie étant très éloigné de la France, ce qui ne favorisait pas les affaires, les installations furent transférées dans une usine moderne, située dans la zone du Portello, à la périphérie nord de Milan. En 1909, les associés italiens de la société prirent les choses en main, embauchèrent Giuseppe Merosi pour concevoir de nouvelles voitures, et créèrent, en 1909, la marque A.L.F.A., acronyme de Anonima Lombarda Fabbrica Automobili. Cette entreprise fut intégrée, dans les années d'après la Première Guerre mondiale, dans le groupe d'activités géré par Nicola Romeo (à l'origine Sas Ing. Nicola Romeo & C., siège à Milan), et cette association donnera la marque Alfa-Romeo.
En Allemagne, Alexandre Darracq fonda une filiale connue sous le nom de Opel-Darracq, afin de fabriquer des véhicules sous licence, en employant un châssis français, et une carrosserie allemande. Cette filiale contribua ultérieurement au développement de la marque Opel, fondée à l'origine par Adam Opel (1837-1895). Darracq établit également une filiale en Angleterre, la A. Darracq and Company Limited, et le mécanicien d'origine suisse, Louis Chevrolet travailla dans l'usine de Suresnes, avant de partir pour les Etats-Unis, pour y fonder la marque bien connue.
Conscient de l'impact publicitaire de la compétition, l'industriel fit réaliser une longue lignée de voitures de course, petites et grosses, qui aux mains de pilotes de renom, connurent le succès en France et aux Etats-Unis. Dans ce dernier pays, Victor Hémery fut le vainqueur de la Coupe Vanderbilt en 1905, et Louis Wagner remporta cette même compétition en 1906. En France, Hémery termina premier dans la course du Circuit des Ardennes en 1905, et Victor Etienne Demogeot fut le vainqueur de La Course cubaine, courue à La Havane, Cuba, en février 1906.
Le moteur Darracq en illustration était un deux cylindres opposés à plat (flat twin). L'embiellage, simple, comprenait deux manetons opposés, une architecture qui fournissait des impulsions régulières au vilebrequin, et permettait un bon équilibre des forces d'inertie. Sur un type D, série 3, l'alésage était de 130 mm, pour une course de 135 mm (également course possible de 120 mm), ce qui donnait une cylindrée de 3,58 litres. La puissance maximale était de 28 ch, à un régime de 1.200 tr/min. Le poids de ce modèle était d'environ 55 kg. Le refroidissement était par air, la consommation de carburant était de 16 l/h, celle d'huile de 2 l/h.
La distribution comprenait un arbre à cames central entraîné par engrenages, actionnant les soupapes en tête grâce à un système classique de poussoirs et culbuteurs. L'allumage comprenait une magnéto entraînée par pignons, située au-dessus du moteur, et alimentant les bougies (une par cylindre). Le système de lubrification était constitué d'une pompe aspirante et refoulante actionnée par un excentrique, d'un réservoir d'huile principal cylindrique logé sous le moteur, et d'un petit réservoir secondaire situé en partie haute. La lubrification se faisait par pulvérisation d'huile dans le carter. Un axe unique entraîné par un pignon conique et logé en partie arrière du moteur, commandait simultanément, l'arbre à cames, la pompe à huile, la magnéto, et sur la version à refroidissement liquide, également, la pompe à eau.
Les cylindres de ce modèle étaient pris dans une masse d'acier. Le type à refroidissement liquide était doté de chemises en cuivre, soudées à l'autogène. Les cylindres était dotés, en partie basse, de trous de fond de course disposés en cercle dans les parois, ce qui permettait un échappement anticipé partiel par le fond du cylindre. Ce dispositif fut, par la suite, adopté sur certains moteurs de voitures de course de la marque.
Le bicylindre Darracq fut monté sur certaines Demoiselle d'Alberto Santos-Dumont, et surtout, en version dérivée, sur des Nieuport II (N), utilisés, en France et à l'étranger, pour la formation des pilotes. Egalement, une version d'une puissance de 55/60 ch fut développée en couplant deux bicylindres à plat. Darracq proposa également des moteurs d'aéroplanes à cylindres verticaux dérivés de modèles pour l'automobile, type de 55/60 ch, alésage de 120 mm, course de 140 mm, poids de 175 kg, ou type de 100/120 ch, alésage de 170 mm, course de 140 mm, poids de 250 kg.
Source partielle : Gallica, "Les Moteurs d'Aviation", 1912, Etienne Taris, Agence Rol, et A. Berthier.