Moteurs à chemises louvoyantes

 

Ecorché d'un moteur Bristol Hercules Moteur à chemises louvoyantes (sleeve-valve engine) Bristol Hercules, quatorze cylindres en double étoile. Une chemise avec sa lumière est visible sur le cylindre en haut à gauche. Les biellettes reliées aux cames de commande sont entraînées par les engrenages visibles sur le dessus (cylindres avant-cylindres arrières).

– Historique :
Le principe du moteur sans soupapes (moteur borgne, à chemises-tiroirs ou chemises louvoyantes) fut inventé en 1903 par un Américain du Wisconsin, Charles Yale Knight. Au début, l'inventeur ne put vendre son système dans son pays d'origine et ce fut d'abord en Europe que ce type de propulseur fut mis en service. La première licence fut vendue en 1908 en Angleterre, en France, Gabriel Voisin utilisa très tôt cette technique tant pour ses moteurs d'automobiles que pour ceux d'avions. La firme Panhard et Levassor appliqua aussi ce principe à ses véhicules jusqu'au début de la Deuxième Guerre mondiale, en Belgique, la société Minerva l'employa jusqu'en 1940 pour ses luxueuses berlines (Minerva Full Classics™) ainsi que la firme Daimler-Benz pour sa limousine à moteur V-12 nommée 'Double Six'.

En Amérique, on peut citer la marque Silent Knight (1905-1907) dont la publicité vantait ses véhicules à moteurs plus silencieux que ceux à soupapes, le modèle Stearns-Knight de la firme Stearns Company de Cleveland, la Willys-Knight de Willys et en compétition, la Mercedes-Knight qui termina à la cinquième place aux 500 miles d'Indianapolis en 1913. Ces propulseurs adoptaient divers types, six cylindres, huit cylindres, douze cylindres en V ou en ligne, leur principale qualité était le silence de fonctionnement du aux faible nombre de pièces en mouvement par rapport aux poussoirs, culbuteurs, cames et soupapes nécessaires aux moteurs classiques.

– Caractéristiques :
Les contraintes liées aux moteurs à soupapes, qu'elles soient doubles, triples ou quadruples par cylindre sont connues, pour obtenir un large passage des gaz par les orifices d'admission et d'échappement, des soupapes de large diamètre et à levée rapide sont nécessaires. Une levée rapide est obtenue par une forme adaptée de la came, mais le fonctionnement en devient bruyant et de grandes soupapes nécessitent de forts ressorts de rappel pour éviter le phénomène de flottement ou d'affolement. D'autres inconvénients sont que la culasse ne peut être de forme optimisée à cause du logement des soupapes, que la bougie ne peut pas toujours être placée à l'endroit idéal et que la soupape d'échappement est soumise à un fort échauffement.

Pendant le premier quart du 20e siècle, les moteurs classiques souffraient de nombreuses pannes côté distribution, claquements, ressorts cassés, sièges de soupape détériorés, soupapes grillées et nécessitaient de fréquentes révisions. Le moteur sans soupapes était exempt de tous ces défauts, offrait un rendement unitaire remarquable qui lui permettait de délivrer un couple moteur optimal et constant dès les bas régimes ainsi qu'un couple maximal en dessous du plus haut régime de rotation, de plus il pouvait tourner à des vitesses élevées et était d'un grand silence de fonctionnement.

– Moteurs d'avions :
Les moteurs d'avions étaient à l'origine, des propulseurs d'automobiles configurés et extrapolés, bien vite, ils furent étudiés avec des normes en constante évolution pour répondre aux besoins de fiabilité et de rendement propres aux aéronefs et n'eurent rapidement qu'une lointaine parenté avec leurs cousins pour véhicules. Le moteur sans soupapes fut adopté pour sa simplicité de fabrication, son poids inférieur, sa fiabilité et sa capacité de fort couple à bas régime par plusieurs constructeurs, très rapidement par Voisin, puis par exemple par Bristol pour toute la série de moteurs radiaux à refroidissement par air développée à partir de 1926, Perseus, Aquila, Taurus, Hercules, jusqu'au très puissant Centaurus de 1938 et par Napier pour le 24 cylindres en H à refroidissement liquide Sabre dont les études remontaient à 1936.

Pour finir, ces moteurs furent abandonnés ainsi que ceux pour automobiles au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, avec les progrès côté conception et technologie (soupapes refroidies au sodium) et côté métallurgie et lubrification qui permirent aux moteurs à soupapes de surmonter leurs défauts.

– Architecture :
Le moteur à chemise-tiroir double inventé par C.Y. Knight conserve le principe des quatre temps (admission-compression-explosion-échappement) mais sa distribution présente deux chemises concentriques coulissant autour du piston et actionnées via des biellettes par un arbre tournant à la moitié de celle du vilebrequin. Au temps d'admission, les orifices des deux chemises sont face à la lumière d'admission, au temps d'échappement, elles sont alignées avec la lumière d'échappement et aux temps de compression et d'explosion, les orifices ne sont plus alignés de manière à rendre la chambre étanche.

Dans un moteur à chemise unique, la chemise ne se contente pas de monter et descendre, elle décrit un mouvement vertical et rotatif de forme elliptique. Le piston qui coulisse dans la chemise interne reste classique ainsi que l'embiellage, par contre la culasse est prolongée par une partie cylindrique garnie de segments pour former un joint hermétique avec la chemise intérieure.


Coupé Panhard Dynamic 140 de 1936 (photo : Cent ans d'automobile française - Jacques Rousseau, Jean-Paul Caron) Coupé Panhard Dynamic type 140 de 1936 conçu par Louis Bonnier et l'ingénieur Pasqualin.
Ce modèle, très original pour l'époque avec le carénage des roues avant par les jupes des ailes et les grilles de projecteurs, était doté d'un châssis poutre et d'une structure monocoque permettant trois places de front à l'avant, d'une suspension à barres de torsion inédite, d'un freinage hydraulique à deux circuits et d'un moteur six cylindres sans soupapes. Ce type de moteur avait été mis au point par le technicien Krebs au début de années 1920 pour le compte de la maison Panhard. Le modèle Dynamic était disponible en version classique berline à quatre portes, et aussi sous forme de deux coupés, le Junior et le Major.

Le document d'origine de ce texte a été aimablement fourni par Richard Marciniak. D'autres sources documentaires sont Panhard et Levassor 1910 et SNECMA - Bristol 1953.

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